Politique : La FFMKR réunit son conseil fédéral
Sophie Conrard
- 23 mars 2018
La FFMKR a réuni son conseil fédéral les 17 et 18 mars à Paris. Une trentaine d'élus y ont participé et ont fait le point sur les dossiers en cours. À l'ordre du jour, des sujets aussi variés que la transformation du système de santé voulue par Agnès Buzyn, des améliorations à prévoir du côté du régime invalidité décès à la Carpimko, ou encore l'universitarisation de la formation initiale. Compte-rendu.
Les conseils fédéraux rythment la vie de la FFMKR. Ils se déroulent chaque année en mars, en juin, en septembre et en décembre, sur un week-end, et rassemblent une trentaine d'élus : le bureau national, des secrétaires généraux (chargés d'un dossier particulier) et des conseillers fédéraux.
Encore "très remontés suite à la signature de l'avenant 5 par le SNMKR", ils ont évoqué les diverses options de recours envisagées pour faire tomber le texte, raconte Daniel Paguessorhaye, président de la FFMKR, qui fait travailler ses avocats sur le sujet.
L'un des principaux sujets évoqués lors du conseil fédéral est la grande "transformation nationale du système de santé" orchestrée par Agnès Buzyn. Une quinzaine de conseillers fédéraux se sont portés volontaires pour plancher sur les 5 chantiers identifiés par la ministre (qualité et pertinence des soins, le financement et la rémunération, le numérique, les ressources humaines et l'organisation territoriale), par groupes de 2 ou 3. "L'objectif est de tirer de cette réflexion des lignes directrices et des propositions que nous porteront auprès du pilote de chaque chantier", explique le président de la FFMKR.
Certains sujets sont particulièrement délicats : "Agnès Buzyn a par exemple laissé entendre que bientôt, le paiement à l'acte ne concernerait plus que la moitié de nos soins. Il sera remplacé par un paiement à l'épisode de soins (au forfait). Mais il reste encore beaucoup d'inconnues : qui décidera de la répartition du budget entre les différents professionnels de santé qui s'occupent du patient ? S'il faut faire plus ou moins de séances que prévu initialement, parce que l'état du patient le nécessite, comment fait-on ? Qui va décider ? Seront-nous rémunérés pour les séances supplémentaires, le cas échéant ? Autre exemple : pour un patient qui a besoin d'une reprise de PTH, s'il souhaite faire appel à un autre chirurgien ou un autre kinésithérapeute, comment ça va se passer puisque le forfait initial a déjà été versé ? Cela pose notamment des questions d'ordre médico-légal", énumère Daniel Paguessorhaye, qui estime que "l'assurance maladie s'inspire beaucoup d'expériences étrangères qui fonctionnent, mais dans des pays où la plupart des professionnels de santé sont salariés, ce qui ne correspond pas à notre modèle".
L'universitarisation de la formation initiale ira-t-elle dans le bon sens ?
Les conseillers fédéraux ont longuement évoqué la réingénierie du diplôme et l'universitarisation de la formation initiale, suite à la parution du rapport remis par Stéphane Le Bouler (mettre le document à télécharger) aux ministres de la Santé et de l'Enseignement supérieur. "Il ne correspond pas tout à fait à nos attentes", relève le président de la FFMKR, "même s'il y a déjà des avancées : les étudiants en kinésithérapie auront accès aux mêmes droits que les autres étudiants (Crous, restaurant universitaire, etc.)".
Autre problème : "pour la suite des travaux, il n'est pas prévu d'impliquer les parties prenantes, c'est-à-dire les kinésithérapeutes". Est-ce une manière d'éluder la demande maintes fois réitérée de la profession "de mettre à plat la reconnaissance octroyée par le nombre d'années d'études" ? Pour la FFMKR, 240 + 60 ECTS = 300 ECTS. Donc les 5 années d'études des masseurs-kinésithérapeutes doivent être sanctionnées par le grade master. Pour Stéphane Le Bouler, le calcul n'est pas si simple… Il précise dans son rapport que "le fait de situer les formations paramédicales dans un registre LMD ne signifie pas que le master devient l'horizon commun aux différentes formations". L'Igas avait pourtant dit, dans un rapport de juin 2017, qu'il fallait "prévoir la délivrance automatique du grade de licence ou master correspondant" au nombre d'années d'études effectués ! "Alors quoi : va-t-on demander à ceux qui veulent le master de faire une 6e année d'études ?", s'interroge Daniel Paguessorhaye. "Nous comprenons les enjeux financiers, surtout pour l'hôpital. Nous sommes conscients aussi que tout le monde ne pourra pas avoir accès aux pratiques avancées, ce qui implique de réfléchir à qui on les ouvre. Mais dans toute l'Europe, 300 ECTS donnent un master. La France va-t-elle se distinguer une fois de plus en adoptant une autre voie ?"
On notera par ailleurs que le rapport parle des métiers de la réadaptation, et non de la rééducation. Une formulation ambigüe : "Va-t-on élargir notre filière à d'autres professions comme les ergothérapeutes, les psychomotriciens… ou pire, les Staps ?", s'inquiète Daniel Paguessorhaye.
L'Agence nationale du DPC confrontée à des difficultés logistiques
Pour ce qui concerne le DPC, l'année 2018 s'annonce décisive puisque c'est dans quelques mois que doivent être revues les grandes orientations nationales. Le moment venu, "la FFMKR ne manquera pas de faire des propositions via le Collège de la masso-kinésithérapie", explique Jean-Michel Dalla-Torre, premier secrétaire général.
Il a profité du conseil fédéral pour partager une bonne nouvelle : l'enveloppe prévue pour les masseurs-kinésithérapeutes en 2017 n'a pas été entièrement consommée, "aussi disposons-nous d'un fort reliquat que nous allons demander à utiliser en 2018 et 2019, de façon à pouvoir répondre aux demandes qui seront sans doute plus nombreuses que les années précédentes, 2019 étant la dernière année pour remplir son obligation triennale de DPC", détaille-t-il. À quoi doit-on ce reliquat, sachant que les années précédentes, l'enveloppe était épuisée au 3e trimestre ? "Sans doute au passage d'une obligation annuelle à une obligation triennale, qui a conduit certains confrères à reporter leurs projets de formation continue."
ÉlectionJean-Michel Dalla-Torre a récemment été élu président de la section professionnelle à l'Agence nationale du DPC. Sa mission est de "défendre au mieux l'enveloppe budgétaire prévue pour la profession, qui permet de régler les forfaits aux stagiaires mais aussi de payer les organismes de formation continue", explique-t-il. Ce poste lui permet de siéger au conseil de gestion de l'Agence nationale du DPC, avec les autres professions de santé. |
En raison d'une restructuration de l'Agence nationale du DPC il y a quelques mois, les professionnels de santé sont confrontés à plusieurs problèmes d'ordre logistique, "que nous nous attelons à régler au plus vite", précise le secrétaire général en charge du dossier. Les dossiers déposés par les organismes de DPC sont d'abord examinés sur le plan administratif, puis sur le fond par la CSI. L'objectif de l'Agence est de procéder à un premier écrémage pour éviter de financer des formations mal ficelées. En pratique, cela a poussé certains organismes à déposer leurs dossiers au dernier moment, espérant qu'ils seraient validés dans l'urgence. "En décembre dernier, l'Agence a reçu plus de 9000 demandes en 3 semaines ! Résultat : beaucoup d'attente… et 90 % de dossiers rejetés."
Pour éviter que ces difficultés se renouvellent, la date limite de dépôt des dossiers a été avancée au 15 novembre.
L'avenir est à la "kiné 3.0"
Sensible à l'engouement général pour la santé connectée, la FFMKR a créé un poste de secrétaire général à la santé numérique et à la "kinésithérapie 3.0". Il a été confié à Jean-Yves Lemerle, passionné et fin connaisseur de ces thématiques puisqu'il a récemment organisé un congrès sur le sujet et qu'il suit actuellement un DU en santé connectée.
"Au-delà de l'effet de mode, il est à noter que l'Agence nationale du DPC souhaite valoriser les actions innovantes (simulation, e-learning, EPP, interpro…)", précise Jean-Michel Dalla-Torre, attentif à ces questions.
Ce sera par ailleurs le thème des Assises de la kinésithérapie que nous organiserons à Orléans les 13 et 14 octobre (rens. et inscription bientôt disponibles sur www.maisondeskines.com, rubrique "Événements").
Des progrès pour le régime invalidité décès
Gilles Dorso, secrétaire général en charge de la retraite et administrateur à la Carpimko, au nom de la FFMKR, avait de bonnes nouvelles à annoncer : "Le conseil d'administration de la Carpimko a voté des améliorations du régime invalidité décès, ainsi que du régime complémentaire, que nous espérons pouvoir appliquer au printemps 2019", se réjouit-il {1}.
La Carpimko a les moyens de financer ces améliorations sans augmentation de cotisation car "le régime invalidité décès dispose de 7 ans de réserves. Or notre convention de gestion stipule que nos réserves ne doivent pas dépasser 2 ans. Nous avons donc choisi de faire bénéficier du surplus les auxiliaires médicaux, plutôt que de risquer que d'autres viennent y puiser – on ne sait pas de quoi l'avenir sera fait", détaille Gilles Dorso, qui précise que "toutes ces décisions ne tombent pas du ciel : elles sont le fruit d'un travail de longue haleine, sur 18 mois, en bonne intelligence avec les administratifs de la caisse" et en particulier Valérie Vallée, la directrice.
Pour ce qui concerne la grande réforme des retraites prévue par le gouvernement, c'est l'incertitude qui domine. "Ce sera notre principal chantier pour 2018-2019, mais à ce stade, il est difficile de dire quelles pistes de travail nous devons privilégier. Nous attendons avec impatience des annonces du gouvernement", précise Gilles Dorso.
La Carpimko près de chez vousLa Carpimko a décidé de communiquer auprès de ses affiliés, en organisant des journées d'information dans plusieurs villes. Si vous vous posez des questions sur votre régime de retraite et de prévoyance, c'est le moment ! Voici les prochaines étapes de sa tournée : - le 27 mars à Bordeaux Inscription via votre espace personnel sur www2.carpimko.com |
{1} Nous vous donnerons bientôt le détail de ces mesures dans Kiné actualité.
© Ellagrin/Istock/Getty Images Plus