L’hebdomadaire de la profession
pour les kinésithérapeutes

"Mon p'tit coeur"

courrier-des-lecteurs

26 octobre 2016

Votre courrier :

Mon p’tit cœur, ne t’emballe pas comme ça à la première occasion ! Sinon, comment vas-tu monter les escaliers, courir après le tramway ou marcher pour faire les visites à domicile, sans être obligé de t’arrêter pour reprendre ton souffle ? Et si cela se reproduit trop souvent, il serait dommageable que tu déclenches une oppressante douleur dans la poitrine, se prolongeant dans le bras gauche, signant l’infarctus du myocarde. Cela t’obligerait à déclencher une toux vigoureuse ponctuée d’inspirations lentes et profondes qui te réoxygènerait, te faisant repartir suffisamment pour te laisser le temps d’appeler le 15, numéro salvateur, mobilisateur des urgences.
Si tes artères s’obstruent, mon p’tit cœur, il n’y a pas qu’elles : celles de ton voisin, le cerveau, peuvent également l’être. Il s’agit alors d’un accident vasculaire cérébral (AVC) qui oblige à suivre un parcours de soins désormais bien balisé.
Les 800 000 personnes victimes chaque année en France d’un AVC doivent être prises en charge dans des délais courts. Time is brain : le temps, c’est du cerveau. Plus le temps d’intervention est bref, plus la matière grise restera intègre. En moins de 4h30, il faut réaliser une thrombolyse pour désagréger par injection le thrombus. Ou alors, en moins de 6h, réaliser une thrombectomie qui va désobstruer le vaisseau, protégeant ainsi le tissu cérébral.
Le parcours de soins des personnes victimes d’accidents vasculaires et neurovasculaires dans les territoires bien équipés passe par l’une des 135 unités neurovasculaires ou par une clinique d’accident ischémique transitoire. Dans les régions moins bien pourvues, comme la région Centre ou certaines parties de la Bretagne, la télémédecine remédie à la situation.
Le soin, le traitement, la prévention, la connaissance et la volonté de réduire les facteurs de risques (tabac, alcool, alimentation, diabète, hypertension artérielle au-delà de 14 mmHg  systolique et 9 mmHg diastolique) augurent la sortie et le retour à domicile.
Le retour peut se faire transitoirement via un SSR de neurologie ou de cardiovasculaire, puis à domicile. Et c’est là que le masseur-kinésithérapeute continue d’accompagner la récupération de la personne chez elle. Une gestion progressive de l’activité physique optimise les capacités et incite à l’autorééducation.
Tu vois, mon p’tit cœur, l’intérêt de ne pas t’emballer à la première occasion. Tu préserves ainsi le système neurovasculaire et assure une bonne irrigation cérébrale. Me concernant, je n’oublie pas les recommandations de la Haute autorité de santé (marcher une demi-heure chaque jour) et m’engage à te faire écouter et réagir au moindre symptôme. Autrement dit, à prendre le temps de te faire suivre et donc à ralentir ce rythme quotidien qui nous emporte, toi et moi, dans un tourbillon. Ainsi, mon p’tit cœur, contrôlé, éduqué, entraîné, tu n’as nulle raison de défaillir que la raison ignore !

Bernard Gautier (93)
D’après Le parcours de santé des patients cardio et neurovasculaires, Rencontres RH de la santé, le 4 octobre 2016