"Mourir pour des idées"
8 avril 2015
Votre courrier :
Au vu de votre éditorial du 19 mars, je me permets d'avancer ma modeste opinion. Plusieurs paradigmes peuvent être envisagés pour se positionner. Y en a-t-il un qui soit plus pertinent que les autres ?
À ce jour et depuis 1946, notre métier est reconnu nationalement sous la terminologie de "masseur-kinésithérapeute". Pourquoi vouloir changer ? On peut se poser la question.
Chaque mot est important, lorsqu'il s'agit de "définir". C'est une question d'identité, chère à Claude Dubar ou Renaud Sainsaulieu. Il en va même de notre identité professionnelle.
D'autre part, une lecture étymologique associée aux respect des règles grammaticales de notre chère langue française voudraient peut-être voir le retrait du terme "masseur", puisque la "kinésithérapie" est par définition l'association du "mouvement" et du "prendre soin de". In fine, il semblerait que le mot "massage" soit redondant dans l'appellation de notre "art manuel". Le massage n'est-il pas le soin par le mouvement des différents téguments, masses musculaires, viscères, etc. ?
"Il ne suffit pas de s'appeler pour être.
Être nommé sans avoir la reconnaissance ne sert pas à grand-chose"
De plus, la législation indique clairement qu'il fait partie intégrante de notre décret de compétences. Peut-être pourrions-nous choisir de nous en passer (à l'écrit, pas dans les faits) ?
En réalité, force est de constater que les manœuvres politico-sanitaires nous poussent à nous interroger et à nous positionner quant à notre profession à un niveau supérieur.
Ne s'agit-il pas d'une bataille symbolique pour exister encore, et sous une forme à laquelle nous adhérons ?
L'être humain n'est pas toujours favorable au changement, surtout lorsqu'il est source de frustration et de perte.
La réforme des études, sans un accès à la spécialisation universitaire (pneumologie, thérapie manuelle, etc.) qui valoriserait l'expertise métier, a aussi sa place dans cette ébullition. Il faudrait donc du temps pour l'évoquer. Le massage, tout un symbole !
En tant que formateur, j'invite les apprenants à se nommer "masseur-kinésithérapeute" (profession paramédicale à part entière ainsi nommée).
En tant que cadre de santé de proximité, force est de constater que le massage fait partie intégrante de notre métier de thérapeute manuel, et je dirais que le mot "massage" fait partie intégrante de la kinésithérapie. Le dire c'est bien, mais le faire c'est encore mieux !
En conclusion, si notre métier venait à changer d'appellation mais bénéficiait d'une réelle reconnaissance ministérielle et statutaire au sein du paysage médical (et non paramédical), nos instances représentatives et moi-même pourrions très probablement nous satisfaire d'un changement d'appellation. Il ne suffit pas de s'appeler pour être. être nommé sans avoir la reconnaissance ne sert pas à grand-chose si ce n'est à accroître notre frustration...
Je n'ai pas évoqué les pratiques ostéopathiques libérales (voire salariales) de nos amis les "ni-ni", mais il ne me semble pas que le massage soit indiqué dans leur décret de compétences. Existe-t-il d'ailleurs, ce décret ? Il en est de même pour les sages-femmes, etc. La problématique est bien plus complexe et essentielle, me semble-t-il, que celle de l'attachement à un mot, quoiqu'il en dise pourtant long.
À l'occasion, je vous invite à écouter (ou réécouter) la chanson de Georges Brassens, "Mourir pour des idées".
Masso-kinésithérapiquement,
Guillaume Marsault (59)