L’hebdomadaire de la profession
pour les kinésithérapeutes

"Médicaments, iatrogenèse, effet placebo"

courrier-des-lecteurs

24 mai 2016

Votre courrier :

L’OMS définit la iatrogénie comme “les effets nocifs, involontaires et indésirables d’un médicament, se produisant aux posologies normalement utilisées chez l’homme, à des fins prophylactiques, diagnostiques et thérapeutiques ou pour des modifications physiologiques”.
Les principales classes thérapeutiques incriminées sont les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et antalgiques, les médicaments du système nerveux central, ceux du système cardiovasculaire. Elles produisent des troubles de l’équilibre, des malaises et des chutes, des troubles neuropsychiatriques : confusions, délires et hallucinations, dépressions et troubles cognitifs, mais aussi une altération de l’état général, de l’anorexie et des troubles digestifs.
Ces effets indésirables sont la conséquence d’erreurs thérapeutiques, de mauvaise observance ou d’une automédication inappropriée chez des patients polymédiqués et surtout âgés.
Le coût économique est d’environ trois milliards d’euros par an.
La journée initiée par l’URPS Pharmaciens d’Ile-de-France, le 21 janvier dernier, sur les effets du médicament, ne portait pas sur les services rendus par une ingestion dans de bonnes conditions diagnostiques et d’observance, mais sur les effets indésirables, quelles que soient leurs origines. Cette autocritique est d’une grande valeur éthique et d’une grande portée pour la santé des patients. Les pharmaciens le font avec objectivité et honnêteté intellectuelle.
L’effet indésirable du médicament produit tout de même un effet qui n’est pas souhaitable, certes, mais qui existe. Dans l’esprit de chacun, un médicament bien prescrit et de prise bien observée doit être efficace. Mais quelle est la limite de cette efficacité ou plutôt quel en est le point de départ ? La substance ou l’idée qu’on se fait de son efficacité. En d’autres termes, le médicament est-il chimiquement actif ou agit-il comme un placebo ?
L’effet placebo est défini à partir du latin : “je plairai”. Mais qu’est-ce qui plaît ? Le prix, l’emballage, la marque, la personnalité du soignant, sa conviction ? Cependant, n’oublions pas le rôle du système génétique, dont le gène COMT (catéchol-O-méthyltransférase) modifie la production de dopamine. Or la dopamine comme l’effet placebo agissent sur la même zone du cortex préfrontal.
Quoiqu’il en soit, l’effet placebo produit un effet et déclenche une réaction du cortex, en particulier contre la douleur [1]. Il ne s’agit pas de donner des placebos à l’ensemble de la population puisque seulement 35 % des personnes sont réceptives. Mais il est intéressant de s’interroger sur le processus d’action du cerveau et d’essayer de comprendre ses capacités infinies. (…)

Bernard Gautier (93)

[1] Formation “Kinésithérapie et douleur”, Laurent Rousseau, 5-6 février 2016.