"Le point sur les dispositifs d'auto-entraînement périnéal à domicile"
11 mai 2016
Votre courrier :
Depuis quelques années apparaissent sur le marché différents dispositifs d’auto-entraînement périnéal à visée d’auto-rééducation des muscles du plancher pelvien (cônes vaginaux, sondes d’électrostimulation). Ces différents matériels ont été testés et ont fait l’objet d’études montrant leurs intérêts et leurs limites. (…)
L’argumentaire commercial repose en partie :
- sur le manque de temps des femmes : “Rééduquez votre périnée où vous voulez, quand vous voulez”, “Soyez libre”… Nous rappelons qu’il s’agit de sondes intra-vaginales et que cela constitue une limite pour le choix du lieu et du moment !
- sur le manque de temps : “Prenez juste un instant !” N’est-ce pas un peu court, comme temps d’auto-entraînement ?
- sur le manque d’intimité chez le kiné. Il est sûr qu’à son domicile, la jeune maman entourée de ses chérubins va trouver l’intimité nécessaire qu’elle ne trouve pas au cabinet du thérapeute !
À en croire nos amis, nous proposons des séances d’un classicisme ennuyeux : “Nos exercices ludiques vous permettent de transformer les contractions musculaires rébarbatives en véritables challenges ludiques. Les séances de rééducation sont divertissantes tout en étant aussi efficaces que les séances plus classiques.” (…)
Donner une image péjorative des séances de rééducation est une chose. Mettre en ligne des informations fausses à l’attention du grand public est plus gênant. Nous relevons sur l’un des sites des erreurs édifiantes : “Certains sports sont potentiellement délétères pour le périnée : course à pied, marche, basket, judo, natation, trampoline, golf…” Mesdames, restez allongées ou volez !
Les blogs sont rendus accessibles au public pour une phase d’information et de pré-commercialisation des produits. Certains kinésithérapeutes n’ayant pas hésité à mettre leur nom et leur contact, on peut se demander si cela ne constitue pas de la publicité, ce qui nous est interdit. D’autres, plus discrets, ne mentionnent que leur prénom. L’article publié dans le Ka n°1440 du 24 mars est accessible dans sa totalité au grand public, ce qui constitue une publicité pour le futur centre Crome de Montmorency et une concurrence déloyale préjudiciable pour les kinésithérapeutes de cette ville et ses environs.
Le déferlement de ces publicités et la grande activité de certains praticiens sur le net nous ont amenés à émettre des doutes sur les capacités de ces appareils à remplir les tâches annoncées (réception et analyse du signal, analyse 4D des données), sur la sécurité du matériel et l’innocuité des matériaux au vu des délais rapides de commercialisation annoncée et l’absence de protocole de test clinique à ce jour.
L’Arrep est sollicitée fréquemment par des laboratoires pharmaceutiques (Codépharma, Gynéfik…) afin que leurs produits soient testés techniquement et cliniquement. Nous pouvons ainsi apporter notre expertise et nos indications de modifications pour que les produits répondent aux exigences de qualité et de fiabilité. Cette étape de tests techniques est indispensable dans la conception d’un produit avant sa phase de commercialisation, qu’elle soit menée par l’Arrep ou par d’autres laboratoires de test.
Demeurons dans le champ scientifique, non marchand, pour le bien et le respect de nos concitoyennes. Nous souhaitons voir naître le respect de la déontologie professionnelle sur les sites Internet et apparaître une compétition technique avant la concurrence commerciale, les femmes n’ayant pas à pâtir d’une volonté d’être “les premiers sur le marché”. Le vagin des femmes n’est pas une tirelire.
Par le collectif d’experts de l’Association réseau en rééducation périnéale (Arrep)
Réponse de la rédaction :
C’est vous qui déduisez des propos de la kinésithérapeute interrogée dans le Ka n°1440 que les séances de rééducation périnéale sont “ennuyeuses”. Ce n’est pas du tout ce qu’elle dit et elle n’encourage pas les patientes à fuir les cabinets de kinésithérapie. Cet outil d’auto-rééducation est “à utiliser en complément ou dans la continuité de séances de rééducation périnéale”. Précisions qui figurent aussi sur son blog, de manière très claire.
À travers ce blog, son objectif n’est pas de se faire de la publicité mais de dédramatiser la situation (quoi qu’on en dise, la rééducation pelvi-périnéale n’est jamais anodine) et de lever les tabous autour du périnée. Cette démarche nous a semblé intéressante.
Enfin, rappelons que nous aussi, nous questionnons l’efficacité de ces dispositifs d’auto-rééducation, comme dans l’article “Applications pour l’auto-rééducation périnéale : quelle efficacité ?” publié il y a quelques mois (Ka n°1415), pour lequel nous avions d’ailleurs interrogé la présidente de l’Arrep. |