"Lettre ouverte aux représentants de ma profession auprès des organismes d’assurance maladie"
28 avril 2017
Votre courrier :
Mes chers confrères,
Il apparaît maintenant extrêmement probable qu’aucune réelle revalorisation de nos actes ne nous sera accordée à l’issue des négociations que vous menez maintenant depuis plusieurs mois.
Pouvoir facturer deux actes le même jour est anecdotique et l’augmentation d’un ou deux types d’actes, constituant une minorité extrême de notre cœur de métier, c’est carrément se foutre de nous.
Quelle est la situation ?
Nous travaillons pour 16 € bruts par acte, soit aux alentours de 8 € nets. Cette somme implique la prise en charge d’une personne humaine et la mise en œuvre d’une procédure intellectuelle et physique devant aboutir à l’amélioration de la santé d’un patient. Cela demande certaines compétences, acquises en un certain nombre d’années d’études et validées par un diplôme d’État, ainsi que des formations complémentaires que nous finançons en grande partie. Cela sous-entend également l’utilisation d’un plateau technique coûteux, qui ne produira aucun retour sur investissement.
"Il ne faut rien signer qui ne reconnaisse
la valeur d'un acte de qualité"
Dans les faits, ce qui nous est donné nous oblige à multiplier les actes et aboutit soit à l’épuisement des praticiens, soit à des comportements peu reluisants et préjudiciables pour notre image, du genre “dix personnes dans une piscine”.
La reconnaissance de notre profession passe obligatoirement par la reconnaissance de la qualité de notre travail.
Mais on ne peut exiger d’un professionnel de passer trente minutes en tête-à-tête avec son patient pour 8 € nets. Il faut que l’on puisse vivre !
Si l’acte individuel n’est pas reconnu et rémunéré à sa juste valeur (et bien évidemment contrôlé comme il se doit), des cohortes de patients continueront à pédaler sur des machines au lieu d’être prises en charge comme il se doit. Et les représentants des caisses auront beau jeu de continuer à clamer haut et fort que nous sommes bien payés pour ce que nous faisons !
Et qu’on ne me parle pas de dépassements d’honoraires censés compenser l’indigence de notre rémunération, car si cela semble entré dans les mœurs pour les Parisiens, à l’heure du tiers payant généralisé, il n’en est pas question sur la majorité du territoire.
Quant à l’accès direct, bien évidemment il est légitime. Mais quand on travaille treize heures par jour, a-t-on vraiment envie de voir des patients supplémentaires se présenter à nos cabinets ?
À l’instar de nos confrères belges il ne faut donc rien signer qui ne reconnaisse la valeur d’un acte de qualité. C’est une question de dignité et de défense de ce à quoi l’on croit.
Fred Loterie (59)