Les aides financières pour les libéraux de santé passeront par des ordonnances
Sophie Conrard
- 18 avril 2020
Les mesures d'accompagnement financier des professionnels de santé libéraux, qui sont actuellement discutées avec l'assurance maladie, seront mises en œuvre par voie d'ordonnance, a fait savoir hier Nicolas Revel, le directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam).
Nicolas Revel était auditionné par visioconférence par la commission des affaires sociales du Sénat sur l'impact de la gestion de l'épidémie de Covid-19 sur l'assurance maladie. Il a évoqué les mesures de compensation de pertes de revenus des professionnels de santé libéraux annoncées le 1er avril par le ministre de la Santé, Olivier Véran. "La mission qui m'a été confiée par le ministre consiste à mener une concertation et à faire ensuite des propositions au gouvernement. C'est le gouvernement qui arrêtera ce dispositif de compensation, puisqu'il se traduira dans le champ législatif par voie d'ordonnance", a indiqué le patron de la Cnam.
Ce dispositif entrerait ainsi dans le cadre de la quarantaine d'habilitations à légiférer par voie d'ordonnance prévues par la loi instaurant le dispositif d'état d'urgence sanitaire, dans lequel la France se trouve depuis le 24 mars.
Nicolas Revel a précisé qu'il ne s'agissait pas d'une négociation conventionnelle, car le cadre législatif et réglementaire ne permet pas de discuter de mesures d'accompagnement pour faire face à une réduction de l'activité des professionnels de santé conventionnés.
"Nous sommes amenés à travailler sur un dispositif qui n'est pas maintien pur et simple des honoraires et chiffres d'affaires des différentes professions de santé, mais bien un accompagnement de la perte d'activité", a-t-il souligné. L'objectif est de faire en sorte que les praticiens concernés puissent couvrir leurs charges fixes (loyer, emprunt, cotisations sociales et prélèvements fiscaux, amortissement des équipements, etc.), en veillant à ce que l'aide "n'ait pas d'effet désincitatif" pour les professionnels de santé qui peuvent continuer à travailler, a-t-il précisé.
L'accompagnement prendra en compte les autres aides qui pourraient être mobilisées au titre du fonds d'urgence et du chômage partiel, ainsi que les revenus d'activité réalisés au titre de la période.
Les ordonnances publiées « dans les prochaines semaines »
Les concertations sont toujours en cours et seront suivies par un arbitrage interministériel sur les paramètres financiers, a indiqué Nicolas Revel, ajoutant que la publication de l'ordonnance devrait intervenir "dans les toutes prochaines semaines". L'assurance maladie devra ensuite permettre à chaque professionnel de santé éligible, via un téléservice en cours de développement, de bénéficier rapidement d'un premier acompte. Si la baisse d'activité devait se poursuivre en mai, "nous pourrons réactiver fin mai un 2e acompte au regard du constat sur les 4 semaines de mai", a précisé le directeur général de la Cnam.
Il avait auparavant confirmé que les cabinets de médecins libéraux subissaient une baisse d'activité "tout à fait notable" sur les "3 dernières semaines", soit depuis le 23 mars, de l'ordre de -40% pour les médecins généralistes et de -50% pour les autres médecins spécialistes. "D'autres professions sont quasiment à l’arrêt : je pense aux chirurgiens-dentistes, aux masseurs-kinésithérapeutes, ou encore aux orthophonistes", a ajouté Nicolas Revel. Les infirmiers subiraient une baisse "très légère".
Il faut réinstaurer une continuité des soins
"Tout cela montre qu'il y a un très fort ralentissement de l'activité qui maintenant dure depuis 3 à 4 semaines, selon les professions, et qui risque de se poursuivre encore un certain temps et appelle évidemment la mise en place d'un dispositif ad hoc", a observé Nicolas Revel.
Il a indiqué par ailleurs qu'il était nécessaire que les cabinets de praticiens libéraux puissent reprendre leur activité, touchée par les mesures liées au confinement de la population : "Il y a maintenant un véritable enjeu à ce que la continuité des soins puisse être retrouvée", a-t-il observé, évoquant une perte de chance pour le patient du fait d'un renoncement aux soins. Il a précisé par la suite que certaines données encore provisoires montraient que la baisse du nombre de consultations observée en population générale était du même ordre pour les patients en ALD.
(avec APMnews)
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